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IDENTIFIER L'ESPACE ARCHITECTURAL 3
PROFANATION AMBIVALENTE
Profanation et rite culturel
Étymologiquement, la profanation est blasphématoire. C’est l’acte de souiller le sacré isolé par le contact humain. Le sacré est saccagé par la profanation, mais le sacré persiste toujours. D’ailleurs, la profanation d’Agamben, rend le sacré isolé en usage général (paragr. 1). Cette profanation se réfère à la recherche d’une possibilité de nouvel usage, mais le sacré persiste toujours en maintenant sa valeur. Sur la profanation, il faut souligner que la sacralité se maintient malgré la violation du sacré. La violation peut être commise individuellement, mais ce n’est pas l'objet de cet essai. Ici, on traite de la violation collective institutionnalisée. C’est le rite culturel, comme un exemple typique de ce type de violations. Les rites religieux sont toute transgression collective de l'approche du sacré. Ces transgressions s'expliquent par le totémisme comme la forme primitive de religion. Dans le totémisme, l'accès ou le contact avec le totem sacré est sévèrement interdit. De cette manière, le clan fait la distinction entre sacré et profane. Selon Durkheim, « tout un ensemble de rites a pour objet de réaliser cet état de séparation qui est essentiel » (p. 293). Il existe deux types de rites : les cultes négatif et positif. Dans le premier, il y a divers rites ascétiques: « ne pas toucher les tabous ». Dans le second, il y a le sacrifice, le rite mimétique et le commémoratif. Ces rites positifs sont tenus comme une célébration de l'excitation et de l'enthousiasme. D’autre part, il y a le rite piaculaire, comme rite positif, qui est effectué comme un rite de deuil dans la douleur et la colère. (Durkheim. p. 370-371).
En général, ces deux types de rites positifs ne sont pas pratiqués de façon clairement distincte. Dans le rite totémique, les caractéristiques de divers rites coexistent, particulièrement la célébration et le deuil. La raison pour laquelle ce trait contradictoire apparaît dans un rite totémique est due à l'ambiguïté du sacré. Dans le totémisme, des forces sacrées ne sont pas uniques (Durkheim. p. 387). Il y a une puissance bienfaisante et pure qui distribue ce qui est bénéfique au clan, alors qu'il y a aussi une puissance maléfique et impure qui nuit au clan. Alors que le rite sacrificiel exécute une transgression rituelle pour approcher le sacré positif de bonne puissance, le rite piaculaire conduit à une violation rituelle qui se rapproche du sacré néfaste de la mort.
Comme rite d’apprécier le sacré bienfaisant, il y a la cérémonie de l’Intichiuma qui est un bon exemple. L’Intichiuma est à l'origine un culte qui prie pour la prospérité des animaux ou des plantes totémiques. Lors de ce rite culturel, la plupart des clans totémiques mangent leurs propres animaux ou plantes totémiques, auxquels il est normalement interdit d'accéder ou même de toucher hors du temps rituel. Selon Durkheim, la raison pour laquelle ils consomment des plantes et des animaux totémiques est due à une croyance qu’on peut absorber la puissance sacrée. Après avoir absorbé la puissance totémique, le clan souhaite à nouveau la prospérité de la flore et de la faune sacrées. Par ce rite festif, la relation bilatérale entre le clan et le sacré bienfaisant est renforcée. Le point important ici est que l'interdiction d'accès au sacré, le tabou, est intentionnellement transgressée par la manducation rituelle. D'un autre côté, le rite piaculaire approchant le sacré malfaisant est un rite pour pleurer la perte d'une relique totémique. Lorsque la relique totémique d'un clan est perdue à cause d'un désastre ou d'une guerre suivie d’un arrêt de la prospérité de la flore et la faune totémiques, le clan considère la perte des reliques totémiques comme la cause de ce déclin, et même de la mort de membres du clan. Le rite piaculaire est organisé pour se venger de la mort qui cause une telle perte sociale et pour en pleurer les victimes. Le point important est qu'à travers le rite piaculaire, on approche du mal sacré de la mort. Le clan ne se détourne pas de la mort, mais, contre cette mort, il veut établir un nouvel ordre. Grâce à ce deuil, la relation bilatérale entre le clan et le sacré malfaisant est réinitialisée.
Le rite sacrificiel qui célèbre la prospérité par la bonté est opposé au rite piaculaire du deuil pour la perte par le mal. Cependant, soit bienfaisantes soit malfaisantes, ces forces convergent vers le sacré. De plus, qu'il s'agisse des rites sacrificiel ou piaculaire, les gens violent collectivement et intentionnellement l'interdiction d'accès au sacré. En résumé, les rites transgressifs contaminent le sacré. À cet égard, le rite est profane.
Ambivalence de la profanation
Les forces bienfaisantes et malfaisantes apparaissent sous la forme du sacré. Dans le concept du sacré, deux forces sacrées sont mélangées. Durkheim montre un exemple physiologique pour le mélange ambigu de ces deux forces contradictoires. Pour le clan Totem, le sang menstruel est un déversement inquiétant, mais en même temps, il est également utilisé comme ingrédient de base pour fabriquer des médicaments salutaires (Durkheim. p. 389). Le sang menstruel est une humeur ambiguë remplie de forces bienfaisantes et malfaisantes en même temps. Il s'agit de parmakon, qui est à la fois toxique, mais aussi médicamenteux. Cette coexistence ambiguë des forces opposées est définie comme l’ambivalence. Un excellent exemple de l’ambivalence se trouve dans la religion. C'est le sacrifice. L’animal totémique est à l'origine sacré. Cependant, pour le rite sacrificiel, cet animal endosse la responsabilité ou porte tous les péchés du peuple. Cet animal dont le péché a été transféré devient impur. Il est abattu en sacrifice et ses intestins sont dédiés aux dieux pour le rite. En outre, sa chair et son sang sont distribués aux gens. Le cadavre de l'offrande sacrificielle est dédié au sacré et en même temps offert pour le profane. C'est le concept de « sacrifice rituel » d’Hubert et Mauss (Girard. p. 13). Le sacrifice doit être contaminé pour être sacrifié au sacré. Autrement dit, il doit être profané. L'ambiguïté du sacrifice pénètre à travers le rite, la croyance et la communauté. À travers le rite du totem, la communauté blasphème et loue simultanément.
Sentiment ambivalent et animal totémique
Le culte totémique, où le tabou est délibérément insulté, est une expression religieuse de l'émotion ambivalente de l'humanité. Lorsque cette émotion est psychologisée, elle est intériorisée comme le sentiment ambivalent et révélé comme des attitudes ambivalentes (Freud. p. 50). C'est une expression du double sentiment des Fils primitifs envers le Père ancestral (Freud. p. 186), qui est un personnage anthropomorphique du sacré ambivalent. C'est une analogie phylogénétique pour expliquer l'ontogenèse du psychisme ambivalent du fils à propos de son père. Ce psychisme ambivalent est un état dans lequel coexistent des sentiments opposés d'affection et de haine, ou de respect et de mépris pour le père. Freud appelle la zoophobie clinique pour utiliser l’animal comme un substitut du père. À travers cela, il explique ethnographiquement que le Père primitif mythique est rené comme un animal totémique.
Le rite totémique est une représentation de sentiments ambivalents. Dans la nuit des temps, il y avait un Père ancestral qui monopolisait les femmes de sa tribu. Les Fils adultes voulaient s'enivrer avec elles, mais c'était impossible à cause d’une interdiction paternelle. Avec la force, ils se sont opposés au Père et l'ont tué. Ils ont mangé sa chair et bu son sang pour gagner sa force. Ils voulaient prendre les femmes qui avaient été libérées du monopole du Père. Cependant, les fils en pluriel ne pouvaient pas monopoliser les femmes comme le Père singulier. En effet, pour réaliser un monopole paternel, il faut s'entre-tuer jusqu'à ce qu'un seul reste. Alors ils ont fait une sorte de contrat. Les Fils interdisent les contacts sexuels avec les femmes du même clan. C’est l’origine de l’exogamie.
Le rite totémique est un culte ambivalent, de deuil du Père et de célébration de l’éloge de soi, pratiqué par les Fils qui ont créé ce nouvel ordre. Ce « deuil est suivi de la fête la plus bruyante et la plus joyeuse. Avec déchaînement de tous les instincts et acceptation de toutes les satisfactions » (Freud. p. 197). Comme mentionné précédemment, le rite totémique est un événement profané, mélange du culte sacrificiel et du rite piaculaire, c'est-à-dire, de deuil et de fêtes. L'ambivalence du rite totémique est basée sur le sentiment ambivalent: les Fils qui ont tué le Père se sont sentis coupables parce que, en tuant le Père ancestral, aucun des Fils ne pouvait satisfaire le désir d'inceste. « Était-il nécessaire de tuer le Père? » Ils ont ressenti un regret. D'un autre côté, ils étaient fiers d'avoir tué le Père et de gagner du pouvoir. Ils ont pu obtenir leur satisfaction sexuelle en échangeant les femmes du clan avec des femmes des autres clans. Il y avait un sentiment de satisfaction: « Nous avons bien tué notre Père! » Sur la base de ces sentiments ambivalents, ils ont fait du père comme un totem. Cependant, comme le cadavre du Père-totem ne pouvait pas continuer à fournir de la chair et du sang, il a donc été remplacé par un animal. Dans la vie de tous les jours, cet animal totémique était sacré. Toutefois, pendant le rite totémique, les descendants des Fils ont tué cet animal totémique. Ils ont consacré certains organes au Père ancestral, ou Dieu. Ils ont également consommé eux-mêmes le sang et la chair de cet animal. En faisant l’oblation divine et en même temps la patriphagie, les fils ont pleuré leur père et ils ont célébré la victoire du meurtre du Père ancestral.
Profanation et lieu
Le lieu où se déroule le rite totémique est également ambivalent. Ici, le sacré descend et le profane monte. Comme si le sentiment envers le Père ancestral est ambivalent, le rite totémique a aussi deux caractéristiques divergentes. Le premier est la transmission de la culpabilité dans le meurtre du Père ancestral. La seconde est une célébration fraternelle du meurtre du Père ancestral. Dans le rite totémique, le Père ancestral ou Dieu sous la forme d’un animal totémique, est vénéré et aussi blasphémé par les Fils. Cette offrande profanée est consacrée pour le rite profané dans le lieu profané. Le mot latin profanum signifie devant, pro-, lieu sacré ou sanctuaire, fanum. Le profanum se situe entre l’aire sacrée et le monde mondain. Il y a le profanum comme le profane entre le respect de l’interdiction et la transgression du tabou. Le profanum est comme une ouverture dans le mur opaque de l’isolement qui rend le sacré possible. C'est comme un seuil qui relie et distingue aussi le sacré et le profane. Dans cette zone de transition, le rite se déroule pour faire une offrande qui est à la fois sacrificielle et piaculaire. Cette offrande a pris les péchés humains, mais ils gardent aussi la force sacrée. Dans ce lieu, les hommes approchent du sacré et violent institutionnellement le tabou, mais le sacré demeure toujours: c’est le lieu profané. Ici, la divinité reste dans le monde, tandis que l'humanité monte vers le sacré. Ceci n’est pas différent de la définition de lieu par Heidegger: « le divin est un attribut essentiel du lieu qui rend possible l’habitat humain » (Han. p. 63).
PROFANISATION ARCHITECTURALE
Raison profanisée du modernisme
Le modernisme est une culture profanisée. Depuis ses racines, l'humanisme ou la science moderne, le modernisme était caractérisé par le rejet de la divinité. Dieu a été rejeté et la Raison a été admirée. Comme il évacue le sacré de son monde, le modernisme est profanisateur. Et alors, La Raison, « peut-elle être devenue un dieu du monde profanisé? » La Raison moderne qui cogitare est un esprit de soi déifié. Pourtant cet esprit ne peut pas vraiment être un dieu. En effet, l’humain ne peut pas exister uniquement en tant qu'esprit. L’homme est obligé de vivre sa vie de l’esprit, de l’âme, de l’intelligence, et surtout, de son propre corps. L’homme moderne pensait qu'un tel destin humain pouvait être surmonté par la suprématie de son esprit nouveau. Enfin, son esprit cogitant a pris la place de Dieu. Cependant, la Raison n'était pas devenue un dieu: il s'était assis sur le trône divin, mais il n'a pas été qualifié comme dieu. Pareillement, malgré les hommes modernes n'ont pas surmonté leur destin, ils célèbrent constamment leur victoire sur Dieu de manière illégale.
L’objet exposé est la relique du modernisme en tant que religion. On peut dire que cet objet est toujours contaminé parce qu'il est toujours exposé au regard de l’homme moderne. Aussi, pour le même objet, on peut dire qu'il n'est pas réellement contaminé parce qu'il n'est pas exposé aux touches de l’homme moderne. Contrairement aux Fils du clan qui offrent des sacrifices profanés au totem, les fils du modernisme consacrent l’improfanable à la Raison déifiée. Les hommes modernes qui croient posséder l'esprit qui est l’équivalent de Dieu n’effectuent que le rite sacrificiel pour célébrer la victoire filiale. Comme ils ne se sentent pas coupables du meurtre du Dieu, le rite piaculaire n’a pas de sens pour eux. Le rite moderne se déroule dans le Musée, le Temple profanisé. On n'a pas besoin de sacrifice incarné comme l’animal totémique pour ce rite. C'est parce que la Raison déifiée qui reçoit l’offrande n’est qu’une projection de l’esprit de l’homme moderne. La Raison divine du modernisme est l'esprit psychologisé des fils cogitants qui ont usurpé le pouvoir du Père ancestral.
Rationnel en architecture moderniste
« Moderniser l’architecture » est différent de « Faire l’architecture moderne ». Le rationalisme était l'idéologie de l'architecture moderne. Le discours architectural de l’époque moderne a poursuivi ce qui est rationnel pour assurer la modernité architecturale. L’architecture fonctionnaliste-rationaliste est un fruit de cette rationalisation. D'un autre côté, l'expressionnisme et l'organicisme, qui sont apparus à la même époque, ont été chassés du discours de l'architecture moderne à cause de l’échec d’une autoidentification comme architecture moderne. Il est nécessaire de noter que les diverses tentatives pour « Moderniser l’architecture » sont devenues « Faire architecture moderne » : le rationnel qui était un moyen de moderniser l'architecture devient le but de l’architecture. C'est une profanisation moderniste en architecture. Dans le processus de cette profanisation, le moyen architectural, le rationnel est capturé par le dispositif idéologique du modernisme et déposé dans une sphère où les moyens sont est intervertis quant au but. Cette sphère est la fonction, le concept qui réduit les activités humaines en une seule échelle de mesure. « Rationaliser l’architecture », pour assurer la modernité, est interverti en « Faire l’architecture rationnelle ».
La rationalité, comme le but de l'architecture moderne, n'est pas un simple but. Elle en vient à avoir une certaine divinité. La rationalité divine a son origine dans la Raison déifiée moderne. La Raison ayant pris la place de Dieu se manifeste de manière moderniste dans le monde. De même, lorsque le rationnel se manifeste architecturalement, l'architecture se transforme en une architecture fonctionnaliste-rationaliste. La rationalité fonctionnelle est comme une théophanie architecturale de la Raison moderne.
Le Musée est le lieu où réside la rationalité munie de la divinité. C’est le temple profanisé. Comme on raisonne sur la relation entre le sacré et le profane à travers la topologie architecturale de fanum et profanum dans le Temple, on peut comprendre où se trouve la rationalité architecturale en raisonnant sur la forme topologique de l’exposition du Musée. Tout comme le sacré l'est dans l’objet sacré, la rationalité en architecture est attribuée à l’objet exposé. Également, tout comme le fanum, où se trouve la relique, est le lieu sacré, le socle sur lequel l’objet exposé est placé est un sanctuaire profanisé. Tout ce que les touristes du musée, les gens modernes, regardent est l’objet exposé rempli de la Raison. À cet égard, on peut définir l'architecture rationaliste comme religion, pour vénérer le Rationnel.
L’objet exposé en tant que le profanisé
Bien que les tentatives des humains d'approcher le sacré aient été rituellement systématisées, il y a toujours des risques. Il faut toujours l’affect courageux, thymos, qui prend les risques d'une violation. Cependant, la profanisation rationaliste est indifférente au sacré. C’est parce que le sacré a été nié et le rite a été dissous. Dans cette situation où le sacré est évacué, seule le désir impulsif, épithymia, stimule l’envie de plaisir. L’homme moderne n'a pas de thymos d'oser toucher l’objet sacré. Or, ils regardent simplement les objets exposés dans le Musée. Au lieu des initiations ressourcées d’une décision de transgresser l’interdit de tabou, on ne trouve, dans le Musée, que les désirs voyeuriste et exhibitionniste.
Byung-Chul Han insiste sur le fait que l’objet exposé a perdu sa valeur rituelle et qu’il est rempli de valeur d'exposition (p 62-63). Cependant, en réalité, ce n'est pas l’objet exposé qui a perdu sa valeur rituelle. C’est parce que ce qui est devenu objet exposé par profanisation était l’objet sacré qui n’avait pas de valeur rituelle à l’origine. Dans le lieu sacré où se trouve la relique, aucune histoire humaine n'était gravée. Les activités des hommes pour le sacré se faisaient dans le lieu profané, profanum. Le rite était organisé ici tout en offrant des offrandes profanées. Alors ce qui a perdu la valeur rituelle n’est pas l’objet sacré, mais l’offrande. L’objet exposé est la relique de la religion rationaliste pleine de valeur d’exposition. Cet objet n’avait pas de valeur rituelle à son origine. La relique a été exposée lors de sa profanisation, et en conséquence, elle n'était remplie que de valeur d'exposition. En effet, chaque face de l'objet exposé est complètement exhibée à l'œil moderne. La situation profanisée dans laquelle tout est toujours montré est de la pornographie de scopophilie. Ce qui est perdu dans l’objet exposé du Musée, c'est le visage érotique de la relique qui était isolée par le tabou ou qui était révélée par la transgression.
Enveloppe en tant que le lieu profanisé
Le lieu profané où on offre l’offrande devient le lieu profanisé par la profanisation moderniste. Pour que toutes les faces de l'objet exposé soient visibles, ce lieu profanisé doit être complètement transparent. « Dans quelle apparence apparaît-il architecturalement le lieu profanisé? » On peut trouver aussi une réponse dans la forme topographique de l'exposition du Musée. Comme le lieu profané se trouve entre la sphère de Dieu où il y a la relique et l’aire de l’être humain, le lieu profanisé, qui doit permettre une exposition visuelle de la relique profanisée et une séparation de cet objet exposé des touristes, se situe entre l’endroit de l’objet exposé et l’aire des touristes, c’est-à-dire entre la vitrine et la zone de visite.
La vitre de la vitrine satisfait la condition nécessaire du lieu profanisé. Lorsque ce type de cloison transparente est appliqué en architecture, on l’appelle l’enveloppe transparente. Elle s’appelle l’enveloppe dans l’architecture moderniste. C’est un élément important de l'architecture moderniste. L'architecture moderniste accordait de l'importance au plan qui permet de réaliser la fonction: « Le plan est le générateur. Sans plan, il y a désordre, arbitraire » (Le Corbusier. 1923). Lorsque le plan se traduit en trois dimensions, il devient un volume dont l’équivalent architectural est l’espace. Un collectif des surfaces qui entourent l’espace est l’enveloppe. Par l’ordre moderniste en architecture, la façade constituée des enveloppes devait être honnêtement traduite dans le plan. L’éthique moderne en architecture aurait dû être achevée par la façade transparente qui expose son espace intérieur.
Cependant, cette enveloppe n'était pas suffisamment fonctionnelle pour la façade honnête. « L’architecture occidentale est partie de l’hypothèse humaniste selon laquelle il est souhaitable d’établir un lien moral entre les deux, le dehors laissant filtrer sur le monde du dedans certaines révélations que le dedans va corroborer. La façade « honnête » parle des activités qu’elle dissimule. Mais, mathématiquement, si le volume intérieur des objets tridimensionnels augmente selon une progression au cube, l’enveloppe qui les renferme n’augmente que selon une progression au carré ; le décalage entre le volume de l’activité intérieur et la surface extérieure correspondante ne cesse donc de croître » (Koolhaas. p. 100). En conséquence, la façade transparente, qui doit honnêtement exposer le plan, est destinée à révéler son intérieur volumique sous un aspect excessif.
Les bâtiments prémodernes avaient un plan limité en raison du poids des murs. Néanmoins, les murs du bâtiment révèlent l'identité sociale, politique ou économique de l’édifice. Par exemple, des histoires de Dieu et des Saints sculptés à l'intérieur et à l'extérieur des murs d’une cathédrale ont rendu possible pour l'architecture d’avoir une narrativité religieuse. Par contre, l'enveloppe de l'architecture moderniste n'a aucun pouvoir d'intervenir dans l’imagination narrative, die narrative Einbuildung, du bâtiment. Lorsque la façade moderniste a dépassé le point critique de l’expression, elle est séparée du plan et enfin ne traduit plus les activités humaines à l’intérieur du bâtiment. Il est évident que le bâtiment, avec la façade qui a perdu sa narrativité humaine, ne puisse pas parler de la prose du monde. L’enveloppe ne peut exprimer autre chose que son identité moderniste.
Le lieu profané est le lieu où un habitat pour l’ensemble du divin et de l’humain est possible (Han, 2012, p. 63). Par exemple, les parois des murs de la cathédrale sont un lieu plein de narrativité de la croyance religieuse, et les façades sont également un lieu plein de narrativité communautaire de la religion. Les murs de la cathédrale sont le lieu profané où le sacré et le profane coexistent. Par contre, dans le projet de la ville radieuse de Le Corbusier, les tours de bureaux sont entourées de l’enveloppe transparente. Par la transparence, il tente de montrer l'activité représentative du modernisme, le travail. Cependant, cette enveloppe qui veut montrer « tout » ne montre rien. Par l’apparence de bâtiment, on n’aura aucune information architecturale : rien qu’en regardant l’extérieur, on ne sait pas si un bâtiment est un hôpital, un musée ou un grand magasin. C’est une tragédie du lieu profané qui est devenu l’enveloppe transparente par la profanisation architecturale.
Offrande totémique profanisé
L'espace architectural est comme une offrande totémique profanisé. Les Fils de totem et leurs descendants ont préparé des offrandes totémiques dans le lieu profané, profanum. Pour le rite totémique qui est sacrificiel et piaculaire, l'animal victime a été tué et son ventre a été coupé. Les intestins ont été enlevés pour le Père ancestral. Plus tard, les offrandes d'animaux ont également été remplacées par des offrandes de céréales. Selon Frazer, cette offrande est pour l'esprit des céréales en tant qu'animal (p. 423), mais elle jouait toujours le rôle d’animal. De plus, les descendants des Fils ont offert une simple fumée comme offrande. C’est l’encensement. Par le parfume de l’odeur de fumée, le Dieu-Père prend l’offrande. D’ailleurs, les Fils ont pris le sang et la chair de l’animal. Ceux-ci sont devenus du pain et du vin.
L’animal totémique conserve son caractère ambivalent malgré leur diversité d'existence. En d'autres termes, il a à la fois le sacré et le profane, de sorte qu'il peut être offert à la fois à Dieu et aux humains en même temps. En effet, l’offrande totémique est l’objet profané. Les fils modernes ont tué les dieux qui mangeaient des intestins, consommaient des céréales ou goûtaient des saveurs. À la place de ce Père, ils ont placé la Raison qui est l'esprit projeté de soi-même. Bien, « quelle est une offrande des fils modernes à la Raison? » C’est peut-être plus immatériel que l’intestin, la céréale ou la fumée, car le modernisme est un culte qui valorise l’esprit immatériel et néglige le corps matériel. On peut en trouver dans la forme topographique de l’exposition du Musée.
L’animal totémique placée dans le lieu profané est l’offrande ambivalente pour Dieu et hommes. Cette offrande est pour le rite basé sur l'ambivalence envers le Père ancestral. Par contre, les fils du modernisme qui n'ont pas de sentiment ambivalent apprécient simplement leurs auto félicitations pour le meurtre de Dieu. L’offrande qu'ils préparent pour la Raison déifiée est l’offrande sacrificielle sans le concept d'expiation. La Raison moderniste réside dans l’objet exposé profanisé. Selon la mécanique de la profanisation, les gens modernes pratiquent le rite, pour exhiber l’objet exposé au regard omniscient, à tout moment et n’importe où. Cette exposition est rendue possible par l’enveloppe transparente de la vitrine qui est la forme profanisé du lieu. Comme si l’offrande de totem était déposée sur une démarcation de deux lieux, c’est-à-dire, sur la zone entre le lieu profané et le lieu sacré, Il y a l’offrande sacrificielle, offerte par les hommes modernes, entre l’enveloppe transparent et le stand sur lequel les objets exposés sont placés.
En général, le rôle essentiel de l'architecture est de diviser le dedans et le dehors en formant une frontière physique. Le dedans est une zone qui protège les humains de sa nature et rend la vie possible. C’est le concept de l’architecture en tant qu’abri. En effet, le vide de ce « dedans » peut être dit comme l'espace auquel l'architecture se réfère. Ceci est l'espace en tant que récepteur des fonctions de l'architecture rationaliste. À l’origine, selon la philosophie de Kant, l’espace, qui ne peut être ni touché ni vu est une des deux formes de l’intuition sensible sur le phénomène. Ce cadre pour intuitionner le monde apparu est devenu, par la modernisation architecturale, un objet architectural, c’est l’espace immatériel en architecture. Maintenant on revoit la vitrine dans le Musée. Il y a l’objet exposé dans la vitrine et des touristes autour. On perçoit un vide immatériel entre le stand dans la vitrine et ses vitres transparentes. À travers la transparence et l’immatérialité, le regard des hommes modernes atteint les faces de l’objet exposé. Par une traduction architecturale, on dit qu’il y a l’espace architectural immatériel entre le Rationnel en tant que divinité architecturale et l’enveloppe transparent comme le profanisé du lieu.
Par une nouvelle interprétation sur la profanisation et la profanation, on a découvert que l’architecture rationaliste est la religion profanisée. Sur cette base, on a précisé que l’enveloppe transparente de l’architecture rationaliste est le profanisé du lieu et que l'espace architectural prend la position de l’offrande totémique dans la religion de l'architecture moderniste. En effet, l’espace architectural dédié au Rationnel, la théophanie architecturale de la Raison qui a usurpé le Dieu-Père, est l’offrande sacrificielle par l'architecture rationaliste en tant que Fils pour le rite moderniste. L'architecture rationaliste tente d’identifier sa modernité en créant l’espace architectural.